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« Cette position de l’ “homme véritable” s’exprime dans la tradition chinoise par une autre triade : le Ciel (tien), la Terre (ti), l’Homme (jen), que l’on présente plutôt dans l’ordre Ciel-Homme-Terre, l’homme étant placé entre les deux extrêmes de façon à montrer sa position centrale. D’autre part, cette triade s’exprime dans le caractère 王 dans lequel le trait horizontal supérieur représente le Ciel, l’inférieur, la Terre, et le médian l’Homme. Par ailleurs, le trait médian est traversé par un trait vertical, expression de l’axe unissant le Ciel et la Terre, et qui forme avec l’autre une croix. Ce caractère, exprime la nature de l’ “homme véritable” et le montre comme “fils du Ciel et de la Terre” et occupant le point central situé sur l’Axis mundi. Or, ce caractère transcrit le wang désignant le “Roi”, l’Empereur ; ce qui signifie que le roi s’identifie à l’ “homme véritable”. Il ne s’agit pas, bien sûr, de l’individu comme tel qui exerce la fonction royale, mais plus exactement de la personnalité supérieure dont il est investi, qui est liée à la fonction royale, et qui lui est donnée, en quelque sorte, en même temps que le “mandat du Ciel” [1]. »
Le roi sacré est véritablement le bien le plus précieux de son peuple. Il est avant tout l’incarnation vivante et le garant essentiel de la spiritualité du peuple. Arracher le peuple à son roi revient à couper l’homme du Ciel et à l’isoler dans un étroit matérialisme, au sein d’une angoisse inconsolable. De tous temps et partout, à commencer par le Japon, le roi est sacré. Un roi qui n’est pas sacré n’est pas un roi. Tant que la souveraineté reste divine, le roi est roi, quelle que soit la réduction de son pouvoir politique. Le tennô japonais a été longtemps sans force politique réelle mais personne n’aurait dit qu’il n’était pas roi. Il restait le dépositaire de la souveraineté divine sans laquelle aucune force politique subordonnée ne pouvait gagner la moindre once de légitimité.
Notre état sans roi, désacralisé, n’a jamais été légitime : les agitations récentes et le vil spectacle de la médiocrité humaine ne font que le montrer une énième fois, si cela était nécessaire. Le roi, hors de la politique, est la source de la souveraineté par son sacre matérialisant et faisant descendre le mandat du ciel sur lui. Le roi ainsi sacré naît à nouveau, et incarne le lien vivant entre les hommes et le ciel. Sans lui, les hommes sont irrémédiablement attirés vers la terre et la bête, dont les avatars sont le matérialisme et l’individualisme. Georges Bernanos, à travers l’abbé Donissan, parle à juste titre de ces pauvres gens qui s’abaissent jusqu’au niveau des mangeoires où se repaissent leurs bêtes [2]. Avec lui, le principe naturel et évident de la métaphysique revient au centre et permet de donner un appui aux âmes humaines afin de les rehausser et d’avancer sur la voie de l’esprit. L’homme est toujours faible, et il ne suffit pas du roi pour tout régler mais, sans lui, la société court fatalement à sa perte et à la destruction de l’humanité.
Le roi sacré est l’axe du monde. Il acquiert une nature particulière et spirituelle, un caractère divin, au moment de son sacre. Son existence doit montrer à tous l’aspect divin de l’homme et inciter à son développement. La lourde charge du monarque réside dans une exigence infinie pour remplir son devoir céleste dont témoignent l’histoire et les hommes.
Un pays sans roi sacré est comme un homme sans Foi, qui se laisserait aller à l’hybris. Sans reconnaissance ni de l’invisible, ni des limites de l’homme, ni de la métaphysique, libre cours est laissé à l’ancien outil de la raison : cette dernière devient tyrannique, froide et désincarnée. Comme l’homme sans foi, l’État sans roi devient totalitaire, c’est-à-dire que la raison débridée devient une tumeur cancéreuse et une cause de souffrances multiples, de douleurs infinies. L’harmonie est impossible. Si l’homme a besoin de la terre pour survivre, il a aussi besoin du Ciel pour vivre. La Révulsion française a coupé l’homme du Ciel en excluant le roi sacré – mais sans le détruire, car on ne détruit pas le Ciel. Elle continue aujourd’hui et tente de couper l’homme de la Terre, aussi, car la Terre rappelle par trop le Ciel dans ses beautés, ses dangers et ses bizarreries. Sans Ciel ni Terre, les illuminés affabulent sur l’homme tout-puissant, seul, absolument seul, terriblement seul ; qui ne peut survivre que par la folie. On ne peut que devenir fou. En plus de croire que l’homme est Dieu, on croit aussi que l’homme est la Terre, et qu’il peut devenir chien s’il le veut, comme il peut avoir pour frère une girafe s’il le veut. Le drame de cette folie, qui ne serait qu’amusante par son absurdité si elle n’avait pas de terribles conséquences bien réelles, est d’imposer à tous les hommes de vivre en constante contradiction avec leur nature réelle ; d’où les souffrances et les angoisses des modernes. Les atrocités de gens qui fêtent la légalisation du meurtre de mineurs – dont la cruauté et le mal banalisé effraient tout homme humain – démasquent aussi et surtout les souffrances extrêmes éprouvées par ces gens : peut-on se figurer la solitude et le mal-être qui poussent un être à se réjouir du meurtre d’enfants ? [3]
C’est pour cela que, sans un roi sacré, et ainsi la métaphysique au cœur de tout, rien ne peut être entrepris et tout reste voué à l’échec. Même si cela fut répété à loisir et peut sembler évident, il faut encore et encore le marteler : il n’est pas possible de faire du bon avec des principes mauvais. Il n’est pas possible de développer l’esprit spirituel de l’homme en niant la spiritualité.
Bien triste le peuple sans son roi. Bien triste le roi sans son sacre.
Il faut sacrer le roi, tout commence par là.
[1] Jean HANI, La Royauté sacrée, Paris, L’Harmattan, 2010 (1984), p. 35.
[3] Référence à un événement récent en Belgique.
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