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[CAUSERIES JAPONAISES INÉDITES] Le client est roi

CAUSERIES JAPONAISES INÉDITES

IX. Le client est roi

Le sens du service au Japon est, dit-on, sur-développé. Je dirais plutôt qu’il est normal et encore en-dessous ce qui doit être attendu. S’il est si hautement apprécié, c’est plutôt du fait de la disparition de tout sens du service dans notre monde décadent.

Le service au Japon est réellement quelque chose d’essentiel. Il suffit de travailler dans une grande galerie pour s’en rendre compte. Qui a dit que la politesse japonaise est rigide et vide de sens ? Faux, archifaux. Elle est au contraire irriguée par l’esprit vrai. Ce n’est pas parce que nous avons perdu depuis trop longtemps déjà tout l’esprit, à commencer par celui du langage châtié, avant même la Révulsion [1], que nous devons imputer les mêmes maux aux autres.

Stage d’apprentissage pour être vendeur dans une galerie. Une liste d’expressions clefs de politesse. A chacune d’elles sont associés un geste et un sentiment. Oui, un sentiment. C’est-à-dire qu’il y a écrit qu’il ne sert à rien de dire le mot et de faire le geste si notre cœur n’est pas dans le bon esprit, si nous n’avons pas envie de prendre soin du client et de lui faire plaisir. Si cela n’est pas la claire vision que toute action et parole se doivent d’être authentiques, c’est-à-dire en adéquation avec notre cœur, qu’est-ce que c’est, je vous le demande ? Oui, la politesse n’est certainement pas une sorte d’ornementation manipulatrice ; ceci est une corruption de la politesse. La vraie, la seule réelle, correspond à l’expression et la concrétisation d’un vrai souci de l’autre, d’un amour du prochain, du désir de servir.

Quand l’on pense à la façon dont on est traité en Raie Publique – je ne saurais dire en France, ceci n’est plus la France -, comment tout un chacun tire la couverture à soi, insulte l’autre, ne sert jamais. Se faire battre à plat de couture juste par une petite et simple galerie au Japon.

Mais jusqu’où va le souci du client ? Première recommandation. Disons qu’un client vient dans votre magasin et essaie un vêtement. Il exprime son hésitation face à un objet similaire chez le magasin voisin. Dans ce cas-là, il est du devoir du vendeur d’aller dans le magasin suivant, et de s’assurer que le client achètera ce qui lui convient le mieux, même si ce n’est pas son produit. Deuxième recommandation, dépasser l’attente du client. Il ne suffit pas de faire plaisir comme le client s’y attendrait. Il faut de plus travailler à dépasser ses attentes et à deviner ce dont le client pourrait avoir besoin sans encore l’avoir à l’esprit. Par exemple, juste avant l’ouverture, une femme enceinte visiblement fatiguée d’être debout attend devant la porte. Dans ce cas-là, proposez lui une chaise, même si le magasin est encore fermé. Tout est imaginable. Le client est roi.

L’esprit se dévoile peut-être dans les plus infimes détails. Une certaine musique signale ainsi aux vendeurs qu’il commence à pleuvoir dehors, et leur donne le signal d’emballer les objets achetés dans un film plastique pour éviter qu’ils soient mouillés une fois le client sorti du magasin. Une autre musique indique que la pluie cesse. Etc, etc.

Même dans un temple de la consommation, a priori immonde par le narcissisme compulsif qu’il devrait susciter et inutile voire dangereux par son effet divertissant, se trouve l’esprit du service traditionnel, et surtout là, la civilisation raffinée l’emporte sur la basse décadence contemporaine qui sévit par trop un peu partout ailleurs.

Pour le dire encore autrement, être vendeur au Japon est une tâche certainement aussi difficile qu’être serveur dans un restaurant étoilé français, dernier bastion du service traditionnel. Sauf qu’ici on est payé 7 euros de l’heure, et que partout on est servi comme des rois.

Servons ! Servons ! Et servons notre Roi comme un roi !

Paul-Raymond du Lac

Pour Dieu, Pour le Roi, Pour la France

[1Vous passerez l’expression. Mais « révolution » signifie retour au point de départ, ce que la « Révolution » n’est évidemment pas. Il faut donc la tourner en dérision.

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